L’AVÈNEMENT DU PARLANT

Pour Mary Pickford, « ajouter du son au cinéma serait comme mettre du rouge à lèvres à la Vénus de Milo ». Certains parient pourtant sur le parlant. Ce faisant, ils révolutionnent l’industrie.

Tandis que la radio devient dans les années 1920 un média de plus en plus populaire, la plupart des studios ignorent les expériences sur le son. Seuls Warner et Fox sy intéressent. N’ayant ni l’aura ni la puissance de Paramount ou de MGM et ne pouvant égaler ces derniers sur leur terrain, ils doivent innover pour se différencier.

La révolution du parlant

Les concurrents restent sceptiques, à l’exception de Fox. Avec Western Electric, la société a développé le Movietone, un système qui permet d’imprimer le son directement sur pellicule, évitant ainsi les problèmes de synchronisation. Le studio restreint son utilisation aux bandes d’actualité. Le 20 mai 1927, les opérateurs de la compagnie enregistrent le départ de Charles Lindbergh vers Paris. Le soir même, le film est présenté devant 6000 spectateurs médusés. Stimulée par ce triomphe, la Fox envoie des opérateurs dans le monde entier pour filmer l’actualité.

Malgré ces succès, les investisement dans le film parlant ne sont pas encore à l’ordre du jour. Il faut attendre le 6 octobre 127, et l’avant première à New York du CHANTEUR DE JAZZ de Crosland, pour que l’industrie comprenne l’inéluctabilité de cette évolution. « Attendez ! Attendez ! Vous n’avez encore rien entendu ! «  Ce soir-là, les premiers mots d’Al Jolson sonnent comme un coup de tonnerre. Interpelée par l’acteur, la salle est captivée !

Il s’agit du pari le plus fou des frères Warner. Pour eux, c’est la fortune ou la faillite. A travers le pays, le film bat tous les records. En 1928, Warner adopte le procédé Movietone, plus efficace, et se concertit totalement au parlant. Les autres majors se décident à suivre le chemin tracé par leur rivale.

LE CHANTEUR DE JAZZ (Alan Crosland, 1927)

Pour lancer le parlant, Warner adapte LE CHANTEUR DE JAZZ, une pièce de théâtre comportant plusieurs séquences musicales. Al Jolson, dynamique, animateur de spectacles de Brodway, alors très célèbre, est engagé dans le rôle-titre. Malgré les difficultés techniques, les scènes sonores sont réussies.

Une redistribution des cartes

Du jour au lendemain, la carrière de toutes les stars établies est remise en question. Seul Charlie Chaplin continue de tourner des films muets ou quasi muets jusqu’en 1940. Certains réalisateurs emblématiques des débuts du cinéma comme David W. Griffith, prennent peu à peu leur retraite.

Le drame romantique, le film à grand spectacle, le burlesque, qui avaient régné sur le muet déclinent. La comédie musicale, le film de gangsters font leur apparition.

L’ensemble des studios est réaménagé pour permettre l’utilisation d’un matériel au départ fort encombrant. L’impact de ces changements sur les coûts de production est conséquent. Les salles de cinéma sont contraintes de modifier leur équipement. De nombreux indépendants ne pouvant assumer ces frais ferment leur portes.

Au final, la révolution du parlant aboutit à un renforcement des majors, seules capables d’effectuer les investissements nécessaires. Contre toute attente, elle accentue également la domination économique du cinéma américain à l’étranger, ce malgré la barrière des langues. Dès 1932, les films sont doublés et de nouveaux prêts à s’exporter.

LE LION DE LA MGM (1928)

Le succès remporté par Warner ne laisse aucun choix aux concurrents. La conversion au parlant est inévitable. La MGM est l’un des premiers studios à réagir en ajoutant du son aux films muets déjà produits. Le changement touche le symbole même du studio. A partir de 1928, chaque représentation de film est précédée du rugissement de Leo, le lion de la MGM.

Source : Cinéma La grande histoire du 7e art – Édition Larousse