LE JOUEUR DE GO (2025) – Critique

LE JOUEUR DE GO (2025) – Critique

Fiche technique :

Notre avis sur le film

LE JOUEUR DE GO

Avant-propos :

Dire que nous attendions ce film à la rédaction de la Minute Ciné était un euphémisme et, clairement, cette attente était méritée : le film est une réussite du genre.

Synopsis officiel :

Ancien samouraï, Yanagida mène une vie modeste avec sa fille à Edo et dédie ses journées au jeu de go avec une dignité qui force le respect. Quand son honneur est bafoué par des accusations calomnieuses, il décide d’utiliser ses talents de stratège pour mener combat et obtenir réparation…

La critique :

Le Joueur de Go est un film qui se distingue par son élégance et sa profondeur, offrant une expérience cinématographique riche et immersive. Ce long-métrage, qui explore le monde des samouraïs mais aussi celui du jeu de go, pose une question fondamentale : le respect à outrance d’un code de conduite strict est-il au final synonyme d’une vie juste ? La réponse à cette question est à la fois forte et touchante.

Réalisation et mise en scène :

La réalisation est d’une finesse remarquable. Chaque scène est méticuleusement composée, avec une attention particulière portée aux détails visuels. La direction artistique est soignée, utilisant des couleurs et des textures qui reflètent les émotions et les états d’esprit des protagonistes en respectant vraiment les codes japonais pour ce genre d’œuvre. Cette réalisation, qui prend son temps, passe de l’intimiste à l’épique en peu de temps. Toutefois, ne cherchez pas dans ce film un ersatz de film d’action hollywoodien, car, dans la pure tradition des films japonais de genre, les combats sont rares mais particulièrement impactants.

Interprétation et personnages :

L’ensemble du casting est de très bon niveau. L’écriture des personnages, surtout les plus ambigus, permet vraiment d’interroger la droiture du personnage principal et son impact sur ses proches.

En conclusion :

Réalisation soignée, film crépusculaire, action rare mais maîtrisée et sublimation du jeu de go pour délivrer un message touchant, Le Joueur de Go est dans la lignée des meilleurs films d’Akira Kurosawa et ravira les fans du genre et touchera particulièrement les amoureux de la culture japonaise.

 

Par Grégory Caumes

Copyright 2024 “GOBANGIRI” FILM PARTNERS

NOTRE NOTE

BANDE-ANNONCE :

Interview & Critique de LIRE LOLITA À TÉHÉRAN

Interview & Critique de LIRE LOLITA À TÉHÉRAN

Fiche technique :

INTERVIEW du réalisateur du film

 

LIRE LOLITA À TÉHÉRAN

Nous avons eu la chance d’interviewer Eran Riklis, le réalisateur du film. La critique sera donc courte car les messages délivrés par Eran Riklis sont bien plus importants. Nous pouvons juste dire que ce film est une réussite absolue et nous vous conseillons vivement d’aller le voir.

Synopsis du film :

Azar Nafisi, professeure à l’université de Téhéran, réunit secrètement sept de ses étudiantes pour lire des classiques de la littérature occidentale interdits par le régime. Alors que les fondamentalistes sont au pouvoir, ces femmes se retrouvent, retirent leur voile et discutent de leurs espoirs, de leurs amours et de leur place dans une société de plus en plus oppressive. Pour elles, lire Lolita à Téhéran, c’est célébrer le pouvoir libérateur de la littérature.

Fast critique du film :

Lire Lolita à Téhéran est peut-être le film le plus important de ces 10 dernières années. La réalisation forte et soignée de Eran Riklis ainsi que les formidables actrices de ce film portent un message féministe particulièrement nécessaire à notre temps. Ce film rappelle que la banalisation de l’horreur peut s’installer à tout moment et qu’en ce moment encore les femmes souffrent atrocement en Iran. Un film fort, courageux et nécessaire.

Question :

Qu’est-ce qui vous a convaincu de réaliser ce film, compte tenu de la sensibilité et de la difficulté du sujet ? De nombreux réalisateurs auraient pu choisir de ne pas aborder un sujet aussi risqué.

J’ai rencontré Azar Nafisi, l’autrice du roman autobiographique du même nom à Washington. Cet échange m’a convaincu de devoir raconter son histoire au cinéma. Et je suis revenu avec les droits de l’œuvre. J’étais déterminé à réaliser ce film mais il m’a fallu six ans pour tout mettre en place, notamment pour trouver le financement.

Ce qui m’a convaincu est le fait même si c’est une histoire iranienne, c’est finalement une histoire universelle. Je pense que ça peut toucher tout le monde, presque toutes les sociétés, surtout aujourd’hui où le monde devient fou. Il fallait raconter cette histoire. Au final je n’ai pas senti que je faisais quelque chose d’exceptionnellement courageux. Je me suis juste dit que raconter cette histoire était logique au regard de mes œuvres passées.

Question :

Il y a des actrices formidables dans ce film. Comment les avez-vous dirigées pour qu’elles soient aussi impactantes, même celles qui ont peu de présence à l’écran ?

Eh bien, je vais vous dire deux choses. Premièrement, il m’a fallu deux ans pour faire le casting parce que j’ai décidé dès le début que je ne prendrais que des Iraniennes, c’est leur histoire. J’ai eu de la chance parce que vraiment, si vous allez à Berlin, Paris, Londres, New York, Los Angeles, vous avez beaucoup, beaucoup d’actrices iraniennes, d’exilées iraniennes, mais des Iraniennes et évidemment des actrices de grande qualité. Je savais dès le début que je voulais Golshifteh Farahani pour le rôle principal parce que je la connaissais, mais ce n’était pas facile parce qu’elle n’avait jamais tourné de film en farsi depuis qu’elle avait quitté l’Iran. C’était donc un vrai défi pour elle, un défi émotionnel. Évidemment, elle a réussi avec brio.

Pour les autres, j’ai passé beaucoup de temps à faire et refaire des auditions. Et finalement, j’ai trouvé vraiment toutes ces actrices formidables. Je suis très pointilleux sur le jeu d’acteur. Pour moi, même si un acteur frappe à la porte, entre, donne le café et s’en va, il doit être bon parce que si quelque chose est faux dans les performances, ça ne marche pas et ça dérègle tout le film. Et puis en termes de travail, nous avons travaillé très étroitement. Nous sommes allés à Rome où nous avons tourné et elles sont venues pour deux semaines de travail intense avant le tournage. Et aussi pendant le tournage, j’étais là. J’étais là avec elles.

Un point aussi qui a rendu leur interprétation crédible est le fait qu’elles étaient aussi très proches les unes des autres. Cela a créé un groupe de personnes qui voulaient jouer ces rôles et qui voulaient être ensemble.

Question :

Pourquoi le choix de Rome pour le tournage ?

Parce que j’essayais de trouver de l’argent en Amérique, en France, en Allemagne, où habituellement mes films sont financés et tournés, mais personne ne voulait faire ce film. Et j’étais à Rome en 2021, pour un petit festival, et il y avait une petite conférence sur les coproductions, et je me suis mis à parler de ce projet de film. Alors deux producteurs italiens sont venus me voir et m’ont dit : « Wow, nous adorons ce livre. Nous adorons l’histoire. Nous adorons vos films. Pouvons-nous être impliqués ? » Et j’ai dit, d’accord.

J’étais dubitatif sur le lieu au départ mais au final Rome est une grande ville et comme toutes les villes du monde, vous pouvez trouver des endroits qui correspondent à Téhéran. J’ai fait beaucoup de recherches sur Téhéran, donc je savais ce que je cherchais. Et aussi, d’une manière intéressante, l’architecture à Rome est similaire à beaucoup de choses. Par exemple, l’Université de Rome ressemble vraiment à l’Université de Téhéran.

Et bien sûr, c’est un film. Vous changez des choses, vous ajoutez des choses. J’ai réussi à trouver des images de Téhéran des années 80 et à adapter le lieu de tournage. Au final c’était une grande expérience.

Question :

Dans votre film, nous sommes témoins de la normalisation de l’horreur dans la vie quotidienne. Comment avez-vous choisi d’introduire ce sens du temps et ce changement progressif dans votre histoire ?

Le pays change, la ville change, les femmes changent. Tous ces éléments étaient difficiles à retranscrire au début. Mais au final, j’ai suivi la logique des chapitres du livre et surtout j’ai calqué le découpage du film sur les livres étudiés par le groupe de femmes. Vous avez Lolita, vous avez Gatsby le Magnifique, vous avez les quatre livres. Au final, je raconte une histoire qui reflète ce qu’elles lisent. C’est comme ça que ça a commencé pour moi. Et puis la chronologie est devenue moins importante. Vous savez, il y a beaucoup de débats. J’ai beaucoup de conversations avec les gens. Parfois, ils disent : Oh, c’est difficile de passer de 1980 à 1995 et puis de revenir en arrière. Mais pour moi, c’est un voyage dans la vie de ces personnes. Donc, le temps, à la fin, le seul temps qui compte, c’est le temps de la conclusion et du final.

Question :

Quel est au final le message du film ? Son but ?

J’essaie de faire des films démocratiques. Donc, je peins le tableau, mais ensuite je fais confiance au public pour regarder le film et prendre ses propres décisions, je leur tente juste de leur donner les clefs de compréhension et je fais confiance au public. Je pense que si quelqu’un vient et ne se soucie pas des femmes iraniennes avant le visionnage, peut-être que le film lui fera changer d’avis.

Mais au final pour moi, bien sûr, c’est un film politique et social. Et oui, ce film est avant tout à propos des femmes, de la lutte féministe, de la lutte contre l’oppression, de vraiment beaucoup d’éléments, mais je les mets juste là et laisse le spectateur en tirer ses propres enseignements.

Ma priorité est de permettre au public de faire sa propre opinion. Pour moi, je pense qu’à la fin, j’essayais avant tout de raconter une bonne histoire. Je pense que si vous racontez une bonne histoire, alors les messages viennent de toute façon.

Question :

Avez-vous, à un moment donné, eu l’idée de raconter l’histoire au présent ?

Oui, je pensais que cela pourrait être intéressant, mais cela pourrait aussi être une erreur parce que si vous le faites aujourd’hui, les éléments récents peuvent après fausser votre message. Quand vous revenez en arrière, d’une certaine manière, c’est plus facile pour vous de dire que si cela s’est passé alors, cela se reflète facilement aujourd’hui.

Donc, je suis resté avec cette époque parce que je pense que c’est une période cruciale. Vous avez une révolution dans un pays qui, jusqu’en 1979, était aussi un pays compliqué, avec le Shah, la corruption… Mais au final c’était comme un pays occidental d’une certaine manière et raconter cette transition est vraiment pertinente.

Mais d’un autre côté, je pense que grâce au casting, qui est composé de jeunes femmes iraniennes modernes, cela rend la transition plus facile, vous regardez quelque chose qui se passe dans les années 80, et vous ne le ressentez pas vraiment parce que le film n’est pas comme un film américain où vous devez voir les clichés de cette époque américaine, non le film à un côté intemporel qui pourrait presque vous faire croire que c’est le Paris d’aujourd’hui.

Question :

Pensez-vous que la société iranienne a beaucoup évolué depuis les années 80 jusqu’à aujourd’hui ou les bases sont-elles restées les mêmes ? C’est une question délicate, nous en convenons.

C’est une question délicate parce que je pense qu’elle a certainement évolué parce qu’il y a une nouvelle génération. Une partie de cette société a en effet évolué, nous le savons parce qu’il y a des exilés, qui sont actifs en dehors de l’Iran, et certains d’entre eux sont actifs en Iran aussi. Nous connaissons des cinéastes, nous connaissons beaucoup d’autres personnes qui essaient de résister à ce régime. Mais c’est intéressant, je me souviens il y a deux ans, j’étais ici à Paris, quand la révolte a pris une ampleur nouvelle et nous avons pu assister à des conférences de femmes iraniennes activistes qui essaient de changer la réalité en Iran aujourd’hui. Mais quand j’étais plus jeune, je faisais aussi cela. Ma mère le faisait aussi. Donc, je pense qu’il y a une continuité dans la lutte.

Et aussi, je peux imaginer que beaucoup de personnes qui combattent le régime, si elles étaient en vie pendant la période du Shah, elles seraient probablement contre le Shah.

Au final le peuple iranien souffre d’une image de pays totalement extrême et dont on oublie la grande histoire. Car en réalité, la Perse a une histoire ancienne incroyable. La culture est incroyable dans ce pays, mais surtout les gens sont incroyables. Nous parlons de 80 millions de personnes. Donc, je pense que comme beaucoup d’endroits, il y a ce que vous voyez habituellement à travers les médias et ce que vous apprenez vraiment. Je pense que la raison pour laquelle je fais des films, c’est vraiment d’essayer d’aller au-delà des gros titres de CNN et de délivrer une image des gens qui peuplent cette nation. Les gouvernements passent, le peuple reste.

Question :

Mais avez-vous subi des pressions pendant le tournage ou avant le tournage, ou aviez-vous peur que cela puisse arriver ?

La seule chose dont j’avais un peu peur, c’était pour mes actrices. Parce que Golshifteh Farahani (l’actrice principale) est une figure publique, et parfois elle effectivement a reçu des menaces et elle a été incroyablement courageuse.

Sur la pression concernant le financement, le fait qu’il soit italien et israélien a permis de réaliser le film dans un contexte sécurisé. Au final, s’ils ont investi, c’est parce qu’ils croyaient en l’histoire. Non, sur moi il n’y avait pas de pression. Je pense que la seule pression que j’avais vraiment était d’être précis. Parce que, bien sûr, nous tournons toujours à Rome et je ne suis pas iranien, donc je dois être très prudent sur les détails. Je suis devenu obsessionnel que ce sujet de crédibilité. La véracité historique des détails paye toujours…

Et je vais vous raconter une anecdote amusante sur mon obsession du détail. Dans les derniers jours du tournage, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait une erreur. C’est une histoire amusante parce qu’à l’université, il y a un panneau sur lequel il est écrit : Une faculté de littérature et d’humanités. C’était écrit en farsi, en farsi et en anglais. Et nous l’avons fait. C’était très précis et tout. Et sur le plateau, pendant que je tournais, un figurant iranien est venu me voir et m’a dit : Vous savez quoi ? Il y a une petite erreur en farsi. Une lettre n’est pas comme elle devrait être. J’ai dit, oh mon Dieu. Qu’est-ce que je vais faire ? Puis, honnêtement, j’ai dit, d’accord, nous allons tourner. Nous allons réparer ça plus tard. J’ai oublié. Puis quand j’étais en postproduction, heureusement, d’une manière amusante, la personne en charge des effets visuels à Rome – qui est iranienne a dit : Oh, il y a une erreur. Elle l’a réparée. Ce sens du détail de l’ensemble de l’équipe est pour moi un point important et au final la plus grande pression que je pouvais me mettre pour respecter le pays et son histoire.

Question :

Donc au final, au niveau du financement du film, ce fut plutôt simple et sécurisé ?

Je pense que oui. Mais je pense qu’à la fin, c’est comme tous les films, c’est un pitch. Je suis allé voir mon investisseur israélien qui ne lit pas directement le scénario mais qui préfère que je lui raconte l’histoire directement. Et là il dit oui ou non tout simplement. Il dit oui ou non. Donc, je suis allé le voir et je lui ai dit : C’est une histoire sur sept femmes qui lisent des livres subversifs à Téhéran, des livres qui ne sont pas autorisés par le régime des mollahs. Et à ma grande surprise, il a adoré. Et il l’a vraiment adoré. Et il a dit : Wow, ça a l’air d’une histoire géniale. Et je pense que c’est comme ça que j’ai réussi à le faire, en convainquant les gens que c’est une bonne histoire. Je ne dis même pas une histoire importante. C’est une bonne histoire. Et c’est d’actualité parce que je pense vraiment, comme nous l’avons dit, c’est dans les années 80, mais c’est aussi maintenant. Cela sera probablement aussi pertinent demain. Je dois vraiment dire que je n’ai rencontré aucun problème politique, sauf si vous ouvrez Instagram ou X et que vous regardez les commentaires. Nous avons une bande-annonce qui tourne sur Instagram. J’étais étonné parce que maintenant, elle a environ 4,5 millions de vues. Wow. Incroyable. Incroyable. Grâce à Golshifteh Farahani, parce qu’elle a 17 millions de followers. J’ai regardé les commentaires et il y en a beaucoup en farsi, donc je les ai traduits. Ensuite, vous voyez des mélanges. Je dirais que 60 % disent : Golshifteh Farahani, tu es la reine. Tu es la plus belle femme et talentueuse femme au monde. Et malheureusement 35 % disent : Tu es une garce. Tu es une femme horrible. Tu es une traîtresse. Et 5 % sont contre moi. C’est comme, oh, c’est moi, c’est le réalisateur. Qu’est-ce qu’il fait ? Pourquoi raconte-t-il l’histoire de l’Iran ? Maintenant, vous regardez ça et vous réalisez que même si vous ne pouvez jamais savoir, probablement la moitié de ces réactions viennent de Téhéran et probablement du gouvernement. Mais je pense qu’il y aura probablement beaucoup de controverses au sein de la communauté iranienne, certainement en Iran, mais le film ne sera jamais montré là-bas malheureusement, car au final le débat aurait du bon.

Question :

Quels sont vos prochains projets ?

Je développe une petite histoire. Ça s’appelle Dog. C’est basé sur un livre d’un écrivain israélien, pas célèbre, qui a souffert de stress post-traumatique. Il a servi dans une unité spéciale de l’armée, et il a souffert de stress post-traumatique à cause de Gaza, mais il y a 15 ans, pas maintenant. Et il a écrit un livre sur quelqu’un qui revient de Gaza. Mais il n’arrive pas à vraiment « revenir » et il finit dans la rue comme un sans-abri, et il va vraiment, vraiment mal, et sa vie est presque finie, et puis il rencontre un chien. Mais ce chien lui sauve la vie. C’est lié aux chiens à Gaza. Donc, c’est une petite histoire. Je l’adore. Je pense que je vais le faire. On verra.

 Un grand MERCI à Eran Riklis de nous avoir accordé cet interview. 

Le film sort au cinéma le 26 mars 2025

Propos recueillis par Gregory Caumes

|Copyright photos Metropolitan FilmExport

NOTRE NOTE

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THE LAST SHOWGIRL (2025) – Critique

THE LAST SHOWGIRL (2025) – Critique

Fiche technique :

Notre avis sur le film

THE LAST SHOWGIRL

The Last Showgirl, de Gia Coppola avec Pamela Anderson, Dave Bautista, Jamie Lee Curtis

La dynastie Coppola frappe une fois de plus, et cette fois-ci c’est au tour de Gia Coppola, petite fille de Francis Ford Coppola, de nous présenter son nouveau film The Last Showgirl, hommage vibrant au cinéma indépendant américain des années 70-80.

Le film relate le destin de Shelly, danseuse et artiste de cabaret qui voit subitement sa carrière et son spectacle s’arrêter après trente ans de bons et loyaux services. Passionnée, envoûtée et d’une génération dépassée par l’évolution d’une société nombriliste et porté sur le sexe, Shelly doit faire un choix : avancer ou rester bloquée dans le passé d’un monde qui a depuis évolué, bien loin des strass et paillettes qu’elle a jusqu’alors toujours connue. Sans équivoque, la réalisatrice aborde avec sa caméra tourbillonnante un chassé-croisé entre deux générations de femmes qui n’ont en commun que l’investissement de leur art où le combat reste le même pour tous : survivre à tout prix dans un monde où tout est éphémère, où tout ce qu’on a pu connaitre auparavant n’existe plus.

Le film montre avec lucidité le basculement et la difficulté de vieillir et d’aller de l’avant quand tout ce que nous avons connu jusqu’à présent s’effondre. Difficile d’opérer un quelconque changement quand son héroïne principale, Shelly, se bat pour faire durer un art du divertissement qui se perd et où la jeunesse doit demeurer éternelle, n’existant plus qu’au travers des bribes de souvenirs et du succès d’autant. Ce n’est pourtant pas faute d’essayer, mais Shelly se heurt rapidement aux fantômes du passé et aux sacrifices que cela implique tout au long de sa carrière, au détriment même de sa propre fille.

Pamela Anderson opère un retour intense et triomphant sur grand écran dans un véritable rôle de composition. Une renaissance pour cette actrice laissée pour compte durant des années, cantonnée au seul rôle de sauveteuse sexy au début des années 90. A travers ce rôle, Pamela Anderson (re)donne l’opportunité et l’espoir aux femmes de son âge d’exister à nouveau sur le devant de la scène au travers de personnages complexes brillamment écrit et mis en scène – On citera notamment Demi Moore dans l’excellent The Substance de Coralie Fargeat.

Epauler par une Jamie Lee Curtis en pleine forme et un Dave Bautista dans un rôle à contre-emploi, The Last Showgirl peut aussi compter sur ses jeunes actrices prometteuses et talentueuses – l’excellente Mckenna Grace ou encore Billie Lourd – ainsi que d’une réalisation sublime et son grain d’image rappelant l’ambiance des films des années 70-80 dont s’inspire et s’imprègne évidement Gia Coppola à travers cette œuvre. Sa B.O. est d’ailleurs tout aussi remarquable, s’inscrivant dans la continuité et l’esprit général du film. On regrettera tout de même un manque d’étoffe dans son scénario et une caméra qui s’agite un peu trop dans tous les sens malgré sa mise en scène novatrice et son panorama réussi d’un Las Vegas désenchanté qui continue de briller.

Ce quatrième long-métrage de la réalisatrice Gia Coppola confirme une fois de plus que le cinéma est une véritable affaire de famille. Prometteuse à ses débuts avec le très bon Palo Alto, The Last Showgirl ne vient que confirmer une fois de plus un nouveau talent de la descendance de Coppola ainsi que d’un avenir assuré dans le paysage cinématographique. The Show Must Go On !

Par Rémi Vallier

Copyright Constantin Film / Courtesy of Goodfellas

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BRIDGET JONES : FOLLE DE LUI (2005)

BRIDGET JONES : FOLLE DE LUI (2005)

Fiche technique :

Notre avis sur le film

BRIDGET JONES : FOLLE DE LUI

« Cet ultime opus conclut avec émotion et douceur les aventures de la célèbre Miss Jones. »

Il y a des héroïnes – et/ou des héros – qu’on aimerait ne jamais quitter. En visionnant au cinéma cet ultime opus des aventures de Bridget Jones, son clap de fin résonne bel et bien ici comme des adieux définitifs. Notre héroïne préférée, véritable référence en matière de pop culture, s’inscrit une dernière fois dans l’air du temps et propose une suite bien différente de ses prédécesseurs.

A l’aube du nouveau millénaire et d’une nouvelle génération de cinéphiles, le début des années 2000 était encore marqué par des comédies romantiques réussies ou gentiment ratées tout droit sorties d’outre-Atlantique ou de nos chers voisins anglophones. Entre autre, Le Journal de Bridget Jones, adapté des célèbres romans de Helen Fielding, débarque dans le paysage cinématographique en 2001, remettant au goût du jour le culte de la culotte de grand-mère, du poids idéal qui complexe et des incertitudes amoureuses qui jalonnent l’existence de ces nouveaux trentenaires – pas encore totalement connectés. En l’espace d’une décennie, cette Jane Austen des temps modernes, hors-norme, dotée d’une maladresse maladive et d’une répartie cinglante et hors de propos, devient le symbole de toute une nouvelle génération de femmes – et d’hommes – à laquelle chacun peut facilement s’identifier. Si le premier opus est légendaire et rentre dans l’histoire des comédies romantiques cultes, on peut difficilement en dire autant des suites qui l’ont succédées. Le deuxième opus reste tout de même drôle et tout à fait dans l’esprit du premier, le troisième quant à lui patauge avec son scénario branlant, pour ne pas dire nul, mettant l’héroïne au centre d’un quiproquo absolument ridicule ce qui en fait l’épisode le moins réussi de la saga.

Ce quatrième opus signe le retour tant attendu – et redouté – de la suite des aventures de Bridget. Et cette suite résonne, dès le début, comme la fin d’une époque. Bridget est ici fatiguée, bouffie, mal assortie, une maman à plein temps qui cherche désespérément à (re)mettre son propre masque à oxygène. Mais elle est aussi veuve et doit faire face au deuil du grand amour de sa vie, l’inoubliable Mark Darcy (Interprété par Colin Firth, qui revient ici le temps de quelques scènes très émouvantes). Tiraillée entre l’avis des uns – sa famille, ses amis – et l’avis des autres – une nounou très jeune, ses collègues de travail – Bridget tente de (re)trouver maladroitement son équilibre intérieur et le plus important de tous : son propre chemin.

Bridget Jones : Folle de lui réussit brillamment à rendre ce dernier épisode émotionnellement fort et extrêmement drôle, accompagné par la douceur infinie et douloureuse du temps qui passe, de nos peaux qui vieillissent, des regrets qui nous traversent, de notre âme qui devient plus sage mais toujours dans le besoin et la nécessité urgente de vivre, comme si le temps nous était compté et que les derniers instants de bonheurs sont peut-être les derniers. D’être heureux et d’avancer même dans l’ombre des jours infiniment plus tristes de ceux qui, dans la lumière, nous ont quittés. L’anglaise iconique décalque également d’un naturel  déconcertant la splendeur et les méfaits de l’âge, celle de la cinquantaine passée, au travers d’une société en pleine mutation où le regard vis-à-vis des femmes vieillissantes change.

La réalisation de Michael Morris rend hommage au genre de la comédie romantique, celle que nous avons connue d’antan et qui nous parait aujourd’hui beaucoup trop mièvre, distillant fraicheur et nouveauté en explorant de nouveaux territoires de mises en scènes. Seule ombre au tableau : une musique parfois mal placée ou trop haute pénalisant l’intensité de certaines scènes. Renée Zellweger nous (re)fait découvrir une Bridget toute nature bien connue du publique et une autre moins connue, plus mature, plus sage mais toujours aussi étourdie et tête-en-l’air. Hugh Grant reprend également du service dans le rôle de l’enfoiré affectif Daniel Cleaver, ses apparitions sporadiques insufflent une véritable énergie et un humour obscène qui avait terriblement manqué à Bridget Jones Baby. Les références des précédents épisodes sont aussi très nombreuses et ponctuent subtilement ce quatrième opus. Le casting original depuis ses débuts participe à rendre ce bouquet final encore plus resplendissant et émouvant que jamais.

Tandis que le rideau se baisse, Renée Zellweger embrasse son rôle de Bridget Jones une dernière fois dans un final à la hauteur de nos espérances et des siennes. Le bonheur retrouvé ? Peut-être, ou du moins, c’est ce que le film cherche à nous faire comprendre jusqu’à ses scènes finales. La vie devrait être ainsi : une fête perpétuelle, bruyante, où l’on célèbre la vie, la mort, l’amour, les rires et les larmes, entouré de tous ceux qu’on aime et les fantômes de ceux qui sont partis. Penser sans amertume au passé et aux regrets. Aimer passionnément, vivre sans retenue et avec légèreté, ne pas se soucier de ce que demain sera fait car le plus important, c’est maintenant. Aujourd’hui.

Tout en nous gratifiant d’un sourire naïf qu’on pourrait reconnaître entre-mille, Bridget Jones tire sa révérence en emportant avec elle son journal de vie, elle qui a mis si longtemps à trouver l’Amour et son équilibre personnel. Entre humour et attendrissement, Bridget Jones : Folle de lui conclut avec douceur et émotion les aventures d’une héroïne à la maladresse légendaire mais qui demeure terriblement attachante. Et si cet épisode devait avoir un autre intitulé que Folle de lui, ce serait probablement celui-ci : L’âge de la Maturité.

Par Rémi Vallier

|Copyright StudioCanal

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FRIEREN (2023) – Critique

FRIEREN (2023) – Critique

Fiche technique :

Notre avis sur l’animé

FRIEREN

Synopsis :

L’histoire suit l’elfe magicienne Frieren, un ancien membre du groupe d’aventuriers qui a vaincu le roi des démons et restauré l’harmonie du monde après une quête de 10 ans.

La critique :

L’histoire de cet animé japonais – sur Netflix et Crunchyroll – commence là où les autres animés finissent, la victoire des héros. Ici nous allons voir comment Frieren, pour qui des dizaines d’années ne sont que de cours moments, va gérer la disparition de ses proches, le temps qui passe et l’impact de l’action de son groupe sur le monde qui l’entoure. L’animé va pousser son héroïne à s’interroger sur le devoir de mémoire, la transmission, les relations humaines et au final sur sa propre humanité et sensibilité.

Il est important de noter que Frieren n’est pas qu’un animé contemplatif. Très rapidement Frieren devra faire face à de nouvelles épreuves avec ses nouveaux alliés en cherchant justement un sens à cette répétitivité de la violence.

L’animation est clairement soignée avec de vrais moments de bravoure des protagonistes, la bande son est à la hauteur des ambitions de l’œuvre et le scénario reste captivant tout en ayant un rythme qui « prend son temps » sans tirer en longueur.

En Conclusion :

Là où certains animés vont viser la surenchère de combats et d’effets visuels sans approfondir le scénario, Frieren va faire un choix à l’opposé et se focaliser sur un récit mélancolique. Cet animé est une réussite totale tant il arrive à vous transmettre les sentiments qui traversent son héroïne et il arrive avec brio à vous embarquer dans cette aventure d’héroïque fantasy avec sa galerie de personnages attachants et sa réflexion poussée sur le sens de la vie.

 

Par Grégory Caumes

|Copyright CrunchyRoll

NOTRE NOTE

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COMMENT DEVENIR RICHE…(2025) – Critique

COMMENT DEVENIR RICHE…(2025) – Critique

Fiche technique :

Notre avis sur le film

COMMENT DEVENIR RICHE (GRÂCE À SA GRAND-MÈRE)

Synopsis officiel :

Quand M apprend que sa grand-mère est malade, il voit une opportunité de mettre fin à ses galères. En jouant les petits-fils modèles, il compte bien décrocher l’héritage ! Mais gagner ses faveurs est loin d’être une mince affaire, et pour toucher le pactole, il est prêt à tout.

La critique :

Ce film thaïlandais est une bouffée d’air frais traitant du sujet pourtant compliqué de l’accompagnement d’un proche vieillissant. Le personnage principal, magistralement interprété par Putthipong Assaratanakul, et sa grand-mère, tout aussi bien interprétée par Usha Seamkhum, vont vous emporter dans une fable touchante, drôle et caustique où se mêlent problème de famille, critique de la société et lien intergénérationnel. Il est très dur de traiter de plusieurs thèmes dans le même film mais l’intelligence du scénario et la finesse d’écriture des personnages permettent de mener à bout une réflexion globale sur la place que nos sociétés donnent aux personnes vieillissantes. La réponse finale est belle et poétique. La vision thaïlandaise de ce sujet est vraiment pertinente et apporte une solution assez universelle.

La réalisation est aussi de grande qualité. Elle oscille entre des plans grandioses et d’autres plus intimistes. Les lieux choisis sont sublimés par le talent du réalisateur et soutiennent le propos du film autant quand il est direct et parfois cru que dans les moments où il tend vers la fable.

Un autre des points forts du film est sa bande son de très grande qualité qui saura vous transporter dans cette histoire et suspendra parfaitement le temps autour de vous.

En Conclusion :

Une fable touchante, triste mais aussi souvent drôle qui suspendra le temps autour de vous pour vous amener dans une réflexion poussée sur votre relationnel à la vieillesse et dont vous sortirez grandi.

 

Par Grégory Caumes

|Copyright Tandem

NOTRE NOTE

BANDE-ANNONCE :